Les humains ont tendances à catégoriser ce qui les entoure, afin de rendre le monde plus intelligible. Cependant, cela peut être dangereux socialement. En effet, le processus de catégorisation ne consiste pas seulement en la mise en place de catégories neutres : les humains attribuent certaines caractéristiques à ces catégories. Ce phénomène de catégorisation a été mis en évidence par Tajfel et Wilkes en 1963 sur des objets (des barres de longueur différentes) (1). Dans leurs études, ils ont montré que les sujets, en catégorisant ces objets (catégories des « barres courtes » et des « barres longues »), voyaient les barres d’une même catégorie comme très ressemblantes, plus qu’elles ne l’étaient réellement (biais d’assimilation). Au contraire, les différences entre barres de catégories différentes étaient perçues comme plus importantes qu’en réalité (biais de contraste).

Un stéréotype répandu : les blondes seraient stupides et superficielles
Il en va de même pour les personnes : les humains créent également des catégories : femmes, hommes, blancs, noirs, musulmans, ouvriers, cadres… C’est la catégorisation sociale (Tajfel 1972 cité par Moliner & Vidal 2003 (2)). Comme pour les objets, les catégories de personnes sont aussi touchées par le biais d’assimilation et le biais de contraste (3; 4) : les différences entre les personnes appartenant à des catégories distinctes sont accentuées (biais de contraste) tandis que les différences entre les membres d’une même catégorie sont minimisées (« ah ! Ce sont bien tous les mêmes ceux-là » : biais d’assimilation). Au final, ce biais d’assimilation fait que les personnes d’une même catégorie vont être perçues comment possédant les mêmes caractéristiques. C’est ainsi que les catégories de personnes se voient conférer une nature et des comportements bien particuliers. Ce sont les stéréotypes, un « ensemble de croyances partagées concernant les caractéristiques personnelles, des traits de personnalité, mais souvent aussi des comportements, d’un groupe de personnes » d’après Leyens (4).
Les stéréotypes sont donc une généralisation touchant une catégorie de personne. Ils peuvent être réducteurs, voire totalement inexacts, positifs (« les femmes sont douces ») ou négatifs (« les femmes conduisent mal »). Les stéréotypes concernent généralement les membres d’une catégorie à laquelle on n’appartient pas, mais pas toujours. Dans ce cas, on parle d’autostéréotype.
En plus des biais d’assimilation et de contraste, il existerait le biais d’homogénéité : généralement, on aurait tendance à minimiser les différences entre membres d’une catégorie à laquelle on n’appartient pas, par rapport à notre propre catégorie. Ainsi, « eux » seraient tous pareils, et « nous » bien différents les uns des autres. (5; 6).
Les stéréotypes seraient activés de manière quasi-automatique en présence d’un membre (ou d’un équivalent symbolique) de la catégorie cible (7; 8). En effet, ce sont des croyances que les enfants connaissent très tôt (9). A l’âge adulte, les stéréotypes ont donc été très fréquemment activés dans le passé.
Attention, bien que stéréotypes et préjugés soient des notions qui se recouvrent, il ne s’agit pas exactement de la même chose : le préjugé est une attitude négative envers une personne, uniquement à cause de son appartenance à un groupe (Allport 1954 cité par Bourhis & Leyens 1999 (10)).
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What is a stereotype?
Humans tend to categorize their surroundings, to make the world more intelligible. However, this can be socially dangerous. Indeed, the categorization process is not only the establishment of neutral categories: humans give them some particular characteristics. This phenomenon of categorization has been highlighted by Tajfel and Wilkes in 1963 on objects (bars of different lengths) (1). In their studies, they showed that subjects, by categorizing these objects (categories of « short bars » and « long bars »), saw the bars of the same category as very similar, more than they were actually (assimilation biais). Instead, the differences between bars of different categories were perceived as more important than they were in reality (contrast biais).
It’s the same for people, humans also create categories: women, men, whites, blacks, Muslims, workers, managers … It is what we call the social categorization (Tajfel 1972 cited by Moliner & Vidal 2003 (2)). Like for objects, categories of persons are affected by the assimilation and contrast biais (3, 4): the differences between people belonging to different categories are accentuated (contrast biais) while the differences between members of the same category are minimized (‘They are all the same’, assimilation biais). Ultimately, all the people belonging to a same category will be seen as having the same characteristics. Thus, categories of persons are given very specific behaviors. These are stereotypes, « a set of shared beliefs concerning personal characteristics, personality traits and often the behaviors of a group of people » according Leyens (4).
Stereotypes are a generalization affecting a category of person. They may be simplistic or even totally incorrect, positive (« women are sweet ») or negative (« women are bad drivers »). Stereotypes typically involve members of a category, which you do not belong to, but not always: it’s what we call autostereotypes.
In addition to assimilation and contrast biais, there is the homogeneity biais: Generally, we tend to minimize differences between members of a category, which we don’t belong to, compared to our own category. So « they » are seen as all alike whereas « we » would be very different from each other. (5, 6).
Stereotypes would be activated quasi automatically in the presence of a member (or as ymbolic equivalent) of the target category (7, 8). Indeed, stereotypes are beliefs that children are aware very early (9). Thus, on adulthood, stereotypes have been activated frequently in the past.
Please note, although stereotypes and prejudices are linked concepts, it is not exactly the same thing: prejudice is a negative attitude toward a person only because it belongs to a particular group (Allport 1954 cited by Bourhis & Leyens 1999 (10)).
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References
1. Tajfel, H. et Wilkes, A. L. Classification and quantitative judgment. British Journal of Psychology. 1963, 54, pp. 101-114. Abstract
2. Moliner, P. & Vidal, J. Stéréotype de la catégorisation et noyau de la représentation. Revue Internationale de Psychologie Sociale. 2003, 1, pp. 157-176. Full text
3. Tajfel, H. Human Groups and Social Categories. s.l. : Cambridge University Press, 1981. ISBN : 0521228395, 978-0521228398. Abstracts
4. Leyens, Jacques-Philippe et Yzerbyt, Vincent. Stéréotypes et cognition sociale. s.l. : Mardaga, 1996. ISBN : 2870095279, 9782870095270. Abstracts
5. Sales-Wuillemin, Édith. Psychologie sociale expérimentale de l’usage du langage : : représentations sociales, catégorisation et attitudes, perspectives nouvelles. s.l. : L’Harmattan, 2005. ISBN : 2747583384, 9782747583381. Abstracts
6. Brown, Rupert. Prejudice: Its Social Psychology. 2. s.l. : John Wiley and Sons, 2010. ISBN :1405113065, 9781405113069. Abstracts
7. Blair, I. V. The Malleability of Automatic Stereotypes and Prejudice. Personality and Social Psychology Review. 2002, Vol. 6, 3, pp. 242-261. Full text
8. Gaertner, S. L. et McLaughlin, J. P. Racial stereotypes: Associations and ascriptions of positive and negative characteristics. Social Psychology Quarterly,. 1983, Vol. 46, pp. 23-30. Full text
9. Désert, M. Les effets de la menace du stéréotype et du statut minoritaire dans un groupe. Diversité (ville école intégration). 2004, Vol. 138, pp. 31-37. Full text
10. Bourhis, Richard Y.. et Leyens, Jacques-Philippe. Stéréotypes, discrimination et relations intergroupes. 2. s.l. : Mardaga, 1999. ISBN : 2870096992, 9782870096994. Abstracts
Très intéressant comme d’hab :
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